Le dossier était sur la table depuis plusieurs mois : réviser les règles qui régissent le permis de conduire et notamment introduire un contrôle des automobilistes dans la durée pour jauger leurs aptitudes à la conduite. Le dossier a fait l’objet d’un intense lobbying avec les personnes et organismes en faveur de l’instauration d’une visite médicale tous les 15 ans pour conserver le permis de conduire et ceux qui étaient contre. Hier soir encore, les tractations allaient bon train et la décision a été prise aujourd’hui.
Les parlementaires européens réunis à Strasbourg se sont donc prononcés en faveur de l’instauration de cette mesure, mais ils n’ont pas adopté le package complet qui était sur la table. Beaucoup d’amendements (343 au total) ont été refusés, mais l’examen médical prescrit tous les 15 ans figure bien dans l’accord parlementaire.
Tous les 15 ans
Concrètement, les automobilistes ne devront pas, mais pourront donc passer une visite médicale tous les 15 ans. Pourquoi? Parce que cet examen médical est en fait optionnel et que son adoption et sa mise en œuvre est laissée à la libre appréciation des États. Il s’agira a minima d’un test de la vue (acuité visuelle d’au moins 0,5 « en utilisant les deux yeux ensemble » ou avec un seul œil ; champ de vision de minimum 120° ; si une maladie oculaire progressive est détectée ou déclarée, le permis de conduire peut-être délivré ou renouvelé sous réserve d’un examen régulier de la vision), le reste des tests – obligatoires ou non – seront quant à eux être définis par les États membres, ce qui risque évidemment de créer à nouveau des inégalités entre les citoyens de l’Europe. Ce sont aussi les États membres qui devront identifier les autorités médicales qui auront la compétence de ces tests. Ce qui risque à nouveau de créer un grand flou et de grandes tensions, car il faut déjà plusieurs mois pour obtenir un rendez-vous chez un ophtalmologue. En outre, qui paiera tous ces tests ? Seront-ils gratuits ou payants ?
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La députée Karima Delli (Les Verts), rapporteur du projet, souhaiterait aussi tester l’ouïe et les réflexes des plus de 40 ans tout en assurant que « l’objectif n’est pas d’embêter les personnes âgées. La volonté est de montrer que nous sommes capables d’anticiper et d’éviter les drames ». Et l’intéressée de rappeler pour faire passer la pilule que le Portugal, l’Italie et quatorze autres pays de l’Union ont déjà mis en œuvre un tel examen, parfois de manière très stricte.
VIAS dit « oui » aussi
On s’en doute, l’Institut VIAS se dit satisfait de cette mesure qui va pourrait contribuer à améliorer la sécurité routière. Interrogé par Sud Info, l’organisme indique que ce test ne peut s’appliquer uniquement aux personnes âgées, car il s’agirait alors d’une mesure discriminatoire.
VIAS rappelle toutefois que les seniors sont plus exposés que les autres catégories d’âge dans la circulation. En effet, toutes catégories confondues (automobilistes, piétons, cyclistes, etc.), ils représentent 63% des victimes décédées sur la route. Mais VIAS rappelle aussi que les plus de 65 ans ne sont pas les plus dangereux sur la route. En effet, les statistiques montrent que ce sont les conducteurs entre 20 et 24 ans qui sont les plus dangereux : ils sont quatre fois plus impliqués dans des accidents graves que les seniors. Pas sûr donc que cette fameuse visite médicale œuvre véritablement en faveur de la sécurité routière.
Interrogé par nos confrères du Soir, le ministre fédéral de la Mobilité, Georges Gilkinet (Ecolo), tempère toutefois : « Le texte voté au Parlement européen doit encore être négocié et devrait laisser une latitude à chaque pays sur la manière de procéder. » Et le ministre précise aussi son point de vue : « l’examen médical généralisé et systématique n’est pas un outil efficace. Ça représenterait une charge de travail importante – environ 400.000 permis doivent être renouvelés chaque année – alors qu’une approche ciblée sur les profils les plus problématiques serait bien plus profitable ». On l’aura compris, Georges Gilkinet n’est pas vraiment intéressé par cette mesure. Les automobilistes belges seront-ils sauvés ? Pas sûr, car les élections de juin entraîneront un nouveau gouvernement qui pourrait très bien être d’un autre avis. Il faudra donc attendre les négociations entre l’Europe et la Belgique pour être fixés.
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