Nio aurait les mêmes ambitions que Tesla : pulvériser le plafond de verre qui entoure aujourd’hui la voiture électrique et égaler le prestige des marques de luxe allemandes comme Audi, BMW et Mercedes auprès des automobilistes du monde entier. Ce n’est pas rien. Cela dit, la transition énergétique – et l’avancement de la Chine est évident sur cette matière – représente une occasion en or, car elle chamboule totalement la hiérarchie existante et crée de nouvelles opportunités pour les industriels capables de la saisir rapidement.
Nio a lancé sa première voiture, la supercar EP9, en 2016. Mais qu’il a mis un pied en Europe en 2022 avec les ET5, EL6, EL7, ET7 (photo) et EL8, tous électriques. Certes, seulement quelques pays ont été abreuvés, dont les Pays-Bas et l’Allemagne, et avec des formules de leasing essentiellement. Les ventes ont été confidentielles jusqu’à présent, avec à peine 2.400 unités pour l’ensemble du continent jusqu’en 2023. Pas vraiment un carton. Et les ventes de Nio ont, comme partout ailleurs, chuté au cours du premier semestre de cette année.
OK en Chine
La marque se porte heureusement mieux dans son pays d’origine et, au printemps dernier, elle a mis en circulation son 500.000e véhicule. Pas mal, mais cela reste malheureusement insuffisant pour cette société cotée en bourse qui n’a jamais réalisé de bénéfice jusqu’ici.
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Cette situation n’est toutefois pas exceptionnelle. Il faut en effet se souvenir que Tesla a aussi été déficitaire pendant longtemps, voir même au bord de la faillite jusqu’à ce que la voiture électrique décolle et que des bénéfices soient enfin possibles. Globalement, aucun constructeur automobile n’est rentable au cours des premières années d’activité. Ce n’est en effet qu’à la suite d’un nombre relativement élevé de voitures produites que l’investissement commence à être bénéficiaire. Les constructeurs traditionnels absorbent cette fluctuation en planifiant le renouvellement des modèles de manière très anticipative sur un modèle pluriannuel.
Fabriqué en Belgique ?
Il y a quelques mois, le fondateur de Nio, William Li, nous confiait en marge d’une conférence à Berlin à l’occasion du lancement européen de la marque que « en période d’incertitude, beaucoup de gens deviennent myopes. Nous pensons qu’il faut planifier la transition sur le long terme. Et ce long terme inclut une usine sur le sol européen, à présent que l’UE va imposer des droits de douane élevés sur les voitures chinoises. »
Aujourd’hui, l’opportunité de reprendre l’usine d’Audi Brussels se présente et, selon le journal De Tijd, Nio serait candidat. Ce qui est parfaitement logique. Car, après tout, Nio a aujourd’hui l’occasion unique de reprendre une usine accomplie dotée d’une main-d’œuvre spécialisée dans les voitures électriques hautes performances et avec une expérience de 6 ou 7 ans.
Gagner du temps
Cette configuration représente un atout considérable pour celles et ceux qui ont conscience de la tâche titanesque de construire une usine depuis zéro. Le besoin de qualité pour la construction même ou les compétences du personnel dans ce domaine sont des paramètres essentiels de réussite. Ce qui vaut aussi pour les fournisseurs.
À la réflexion, tout ceci relativise d’ailleurs les coûts salariaux plus élevés de l’usine d’Audi Brussels par rapport aux sites de production potentiels d’Europe de l’Est ou du Sud. Il s’agit certes d’un inconvénient, mais pas d’un facteur de handicap réel. D’autant plus qu’Audi pourrait se débarrasser de l’usine à un prix avantageux pour éviter un plan de licenciement extrêmement coûteux.
Pour envisager une industrie de long terme, il faudrait toutefois que Nio augmente considérablement ses ventes. Un site de production ne peut pas fonctionner efficacement (ou de manière rentable) avec seulement quelques milliers d’unités pour un marché – l’européen. Pour ce faire, les Chinois devraient lancer une vaste offensive commerciale dans plusieurs dizaines de pays, et ce alors que les ventes de voitures électriques ralentissent. Les moyens financiers de Nio sont-ils assez solides pour ce défi ? Mais à mieux y réfléchir : si les Nio vendues aux États-Unis et au Canada viennent de Belgique, seront-elles taxées à 100% comme c’est le cas actuellement ? Peut-être pas !
De beaux produits
Mais force est de constater que les produits sont convaincants. De quoi clouer le bec à ceux qui parlent encore de Thunderpower aujourd’hui qui avait ambitionné de s’installer sur le site de Caterpillar (Charleroi) alors qu’aucune voiture n’a jamais été produite. L’histoire n’est donc pas la même.
Nous avons testé l’ET7 et avons été très impressionnés par sa technologie électrique et logicielle ainsi que par la qualité de fabrication. William Li et ses hommes ont manifestement bien compris qu’au lieu de tout repenser eux-mêmes, il valait mieux faire appel à des professionnels expérimentés.
Pour le développement du châssis, ils ont ainsi fait appel à leur propre département à Oxford qui emploie du personnel ayant une expérience chez Lotus, Jaguar-Land Rover ainsi que dans l’industrie britannique du sport automobile. Le département de design est en outre dirigé par Kris Tomasson, l’Américain qui a collaboré aux i3 et i8 chez BMW et qui a ensuite participé au lancement de Nio à Munich.
Les véhicules Nio se distinguent notamment par les deux scanners Lidar situés au-dessus du pare-brise, flanqués de deux caméras de 8 mégapixels. En outre, les voitures Nio sont équipées des quatre éléments du supercalculateur à intelligence artificielle de Nvidia, le « Drive Orin », qui traitent 32 Go de données par seconde. Excusez du peu. Celles-ci proviennent des trente-trois caméras qui scrutent l’environnement de la voiture pour donner une image ultraprécise des conditions de trafic.
Solidité financière ?
L’ET7 repose sur une plate-forme traditionnelle avec des suspensions indépendantes et pneumatiques, un moteur électrique par essieu de fabrication maison. L’ensemble est donné pour 480 kW, soit 652 ch. Toutefois, c’est surtout l’efficacité qui impressionne le plus : au terme d’une journée d’essai en Allemagne, incluant des portions autoroutières illimitées, nous avons enregistré une consommation moyenne de seulement 16,5 kWh/100 km (ordinateur de bord). Avec une batterie de 75 kWh, cela représente donc une autonomie de 450 km, et avec celle de 100 kWh, un peu plus de 600 km.
En outre, le système d’échange de batterie de Nio est interpellant. Dans des stations d’échange entièrement automatisées, une batterie vide peut être échangée contre une pleine en seulement quelques minutes. Un tour de force qui soulève toutefois la question de la faisabilité d’un tel investissement à grande échelle en Europe où l’accent est actuellement mis sur l’infrastructure de recharge rapide et publique.
Pour les travailleurs d’Audi Brussels, Nio pourrait constituer un nouvel industriel de valeur. À condition toutefois de conserver un regard critique. C’est clair : la situation d’Audi en Europe est actuellement trop critique pour justifier l’exploitation d’une usine européenne. Mais de l’autre côté, pour améliorer sa position sur le marché, Nio devra persévérer dans ses investissements pendant plusieurs années. A-t-il cette capacité financière ? C’est toute la question.
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