C’est marrant, les coïncidences. Quelques semaines après l’essai de la Bugatti Chiron, Bentley nous a invités à découvrir la nouvelle Continental GT Speed. Bentley, jadis qualifiées de « camions les plus rapides du monde » par… Ettore Bugatti.
Ironie du sort, les deux marques font aujourd’hui partie de la même grande famille VW, et les Bugatti graciles des origines sont à présent à peine moins lourdes que les Bentley. Sur papier du moins, car au volant… N’en disons pas plus, lisez plutôt l’essai de la Chiron Pur Sport. Sachez d’ailleurs que nous parlerons encore de Bugatti dans cet essai Bentley…
Ultime
Mais d’abord, les présentations. Depuis la première génération de la Continental GT, née en 2003, la Speed prend le rôle de version « ultime ». Celle dont le gros moteur W12 bi-turbo de 6 litres est le plus puissant. Dans la première génération, il passait de 560 chevaux dans la version normale à 608 dans la Speed. Dans la seconde génération, il passait de 575 à 625. Et cette fois, il passe de 635 à… 659 chevaux.
Quant au couple, il est de 900 Nm. Autant dire que c’est un moteur qui a du coffre. Autre particularité de la Speed : des retouches châssis supposées en faire une Conti GT plus incisive, plus sportive. De fait, le nom « Speed » n’est pas usurpé. Ainsi la nouvelle venue tue-t-elle le 0 à 100 en 3,6 secondes. Pas loin d’un temps de Supercar. Mais pour le reste, on est plutôt dans le domaine de la théorie.
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Inertie
Car il n’avait pas tort, le cher Ettore. Et sa pique lancée il y a près d’un siècle est toujours d’actualité. La Conti GT Speed dont nous parlons aujourd’hui accuse quelque 2.270 kilos à la pesée, et même 2.430 pour la version cabrio. Pas exactement un poids plume, et c’est précisément ce qui a toujours été le caillou dans la chaussure du modèle.
Aussi loin que nous nous rappelions, les Bentley que nous avons essayées sont en effet extrêmement rapides en ligne droite. Par contre, Speed ou pas Speed, elles n’ont jamais été très friandes de virages (sauf peut-être la très rare version GT3 de route dérivée de la première « Conti » de l’ère VW).
Qui dit poids dit inertie, et cette dernière était toujours extrêmement présente, disons même handicapante, lorsqu’on emmenait danser une belle anglaise sur des petites routes sinueuses. Entre le train avant manifestant une envie nette de continuer tout droit et un freinage moins endurant que votre serviteur en course à pied, on avait la démonstration qu’il ne faut pas confondre vitesse et sportivité. Bon, tout cela étant dit, vous avez probablement remarqué que nous avons conjugué tout ce chapitre au passé !
Métamorphose
Vous savez que Gocar n’a pas pour habitude de baratiner, donc soyons clairs : pour celui qui rédige ces lignes, la Speed est le premier contact avec la Conti nouvelle génération, lancée il y a plus de deux ans. Il est donc possible que les remarques à suivre s’appliquent à toutes les versions, mais nous ne pouvons l’affirmer. En même temps, ce serait étonnant, car la Speed reçoit deux petites choses inédites dans la gamme. D’abord, elle dispose de quatre roues directrices, dont le paramétrage varie en fonction du mode de conduite sélectionné (Comfort, Sport ou B, comme Bentley).
Ensuite, il y a sur le train arrière un différentiel à glissement limité électronique. Il ne s’agit ni d’un « faux différentiel » basé sur les freins, ni d’un « vrai » différentiel purement mécanique, mais d’un système composé de deux embrayages (un par roues) pilotés électroniquement. Un truc qui a largement fait ses preuves sportives sur une merveille comme la Ford Focus RS. Ces raffinements s’ajoutent à une chose présente sur toutes les Conti, à savoir les suspensions pneumatiques pilotées, et les barres antiroulis « intelligentes ». Une bien jolie panoplie technique donc, mais est-ce que ça suffit à transformer la voiture ? Disons qu’après l’essai, nous nous sommes demandé si les ingénieurs Bentley n’avaient pas fait un stage de « comment faire oublier le poids » chez leurs collègues de… Bugatti.
Bluffés
Oui, très clairement, la Continental GT Speed est littéralement métamorphosée. Juste une nuance : elle ne dégage pas subitement quelque chose d’aérien. On sent toujours que la voiture a une masse certaine. Mais sur l’itinéraire que nous avait tracé le constructeur tant sur route qu’à travers une ancienne base militaire abandonnée (logements, piscine publique, supermarché, bunker ayant abrité des missiles nucléaires… un vrai décor de film de zombies !), la Speed nous a bluffés de bout en bout.
Primo, le moteur, évidemment. Il pousse dès les plus bas régimes, et s’il faut trouver quelque chose, ce sera peut-être sa voix trop discrète, et sa boîte double-embrayage 8 rapports parfois pas assez réactive. Mais il y a surtout le comportement, dans son ensemble. Plus la moindre trace de sous-virage, des virages enroulés avec agilité grâce à ses 4 roues directrices, une motricité jamais prise en défaut grâce à ce fameux différentiel, qui peut même se montrer un brin « agressif » et donc faciliter la dérive de l’arrière quand on est d’humeur joueuse.
Enfin le freinage : rien à dire, les nouveaux freins carbone-céramique sont non seulement prêts sans qu’il faille les mettre à température, et pas une fois nous ne les avons senti fatigué. Allez, là encore, il faut bien trouver un truc : la direction ne renvoie pas vraiment les infos, et la pédale de freins non plus. A sa décharge, nous venions d’essayer la Chiron, qui décroche un score de 15/10 dans ces deux domaines. La comparaison est donc un peu biaisée !
Conclusion
Même si une Bentley a évidemment vocation à plutôt mettre le curseur sur le luxe, la Speed propose un équilibre entre luxe et plaisir sportif qui nous a touchés. Franchement, ce n’est plus la même auto qu’avant !
Bentley Continental GT Speed : fiche technique
Moteur : W12, essence, biturbo, 5.950cc ; 659ch de 5.000 à 6.000 tr/min ; 900Nm de 1.500 à 5.000 tr/min.
Transmission : aux 4 roues.
Boîte : double embrayage 8 rapports.
L/l/h (mm) : 4.850/2.187/1.405
Poids à vide (kg) : 2.273
Volume du coffre (l) : 358
Réservoir (l) : 90
0 à 100 km/h (sec.) : 3,6
Prix : 272.370 € TVAC
V-max : 335 km/h
Conso. mixte : 13,7 l/100km
CO2 : 311 g/km
- Design élégant et charismatique
- Générosité du moteur
- Châssis agile, efficace et volontiers joueur
- Boîte auto parfois « en retard »
- Poids malgré tout conséquent
- Manque de feeling de la direction et des freins
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